Voici ce qui est écrit : « À l’université, la référence à la psychanalyse est portée par des enseignants-chercheurs » (page 217). Phrase que, de manière espiègle, j’avais modifié précédemment en proposant « des en-saignants-chercheurs ». Ils saignent la psychanalyse pour donner à bouffer à leurs petits, les étudiants d’aujourd’hui, les psychologues de demain, et cela va de soi, les analystes, et les enseignants-chercheurs de l’avenir.
J’espère, avec mes petites missives, qu’ils pourront rectifier leur cible.
La « référence à la psychanalyse », ce n’est pas le psychanalyste à l’université du titre de l’ouvrage. Saigner à blanc, avec le sourire, tout en faisant du marketing, c’est affirmer, avec le plus grand sérieux que « la formation universitaire référée à la psychanalyse dispose donc, contrairement aux affirmations récurrentes sur ces conceptions prétendument obsolètes et sans validité scientifique, d’une légitimité, et d’une profondeur véritables et historiques » (page 217). Il faut la preuve de ces belles paroles car sans la preuve, les détracteurs, voire les ennemis de la psychanalyse, feront leurs choux gras.
Le discours est vrai s’il est suivi de la preuve matérielle, preuve clinique, j’entends. Sans cela, les détracteurs, voire les ennemis de la psychanalyse diront que c’est du marketing.
Soyons ambitieux : mettons en place une vraie transmission de la psychanalyse à l’université car dans ce frotti-frotta, la psychanalyse deviendra de plus en plus une psychologie à l’université. Peut-être une méthode, une référence, un instrument multi-usage, mais pas une science.
La « pratique solitaire des cliniciens d’orientation psychanalytique » (page 221), m’a rajeuni.
Elle m’a transporté dans cette époque de ma jeunesse où le plaisir solitaire était mon amusement préféré. La différence entre ces cliniciens, comme généreusement ils se proclament, et le petit Fernando, c’est que ce dernier avait douze ans.
Les universitaires orientés par la psychanalyse (page 222), doivent d’abord apprendre à lire l’instrument précieux qu’ils ont entre leurs mains. Pour cela, il faut d’abord retourner sur le divan, lieu qu’un prétendant psychanalyste ne devrait jamais, pendant la durée de son exercice professionnel, quitter. De là ma formule : « La psychanalyse du psychanalyste est sans fin ! » Cela veut dire qu’elle a une sortie, mais que le psychanalyste se doit de continuer sa psychanalyse personnelle, histoire de protéger le psychanalysant et surtout la psychanalyse du Moi de l’analyste. C’est cette position éthique qui peut justifier qu’il soit possible, un jour, de parler de psychanalystes à l’université.
Je cite : « Si le présent ouvrage témoigne de cette importante avancée collective… » (page 222). Il est possible de lire, selon mon interprétation, que ce dont témoigne cet ouvrage c’est surtout d’une avancée dispersée car personne ne tient la barre. Un bateau à la dérive ne présage rien de bon. Et ça, nous le savons depuis Hippocrate (« L’Ancienne médecine », toujours Les Belles Lettres).
La mise en place d’un diplôme de psychanalyste en quatre ans au Brésil et la « multiplication et l’aggravation très préoccupantes des mesures de discrimination, voire d’exclusion, visant les professionnels qui reconnaissent les acquis de la psychanalyse ou s’en réclament dans leur pratique, qu’ils soient soignants ou enseignants, dans les hôpitaux, les centres de soin, les universités, les laboratoires de recherche », en France, comme avait été évoqué par le groupe de Tact, montrent que mes remarques sur ce document sont loin d’être une plaisanterie. L’affaire est extrêmement sérieuse. Il y a le feu dans la cuisine et les souris dansent à la proue du bateau.
Je prends très au sérieux ce qui se passe à l’étranger et en France en ce qui concerne la psychanalyse en général et ce que l’analyste apporte à l’université en son nom.
Pour conclure, on ne juge pas un livre à sa couverture. Après lecture, j’estime que les prétendants à la position de psychanalyste à l’université peuvent mieux faire pour devenir psychanalyste à part et entière – formule propre à Édith – et apporter un discours qui pourra accoucher d’un clinicien parmi les étudiants, voire d’un psychanalyste un jour.
Pour cela, il faut que l’ENSEIGNANT, le vrai, qui souhaite devenir psychanalyste lui-même, continue sa psychanalyse personnelle. Ensuite, qu’il sélectionne dès la première année, les étudiants qui désirent devenir des cliniciens. Pour ces derniers, il faut leur dire l’importance de la psychanalyse personnelle. Une fois que ces étudiants seront en psychanalyse, c’est-à-dire sur le divan, ils auront le droit d’assurer des consultations de type CPP dans un local que la Faculté dédiera à cette fin. Pour cela, il faut que les universitaires se mettent en relation avec les responsables des écoles de psychanalyse.
Si cela se passe de cette manière, si cette expérience est concluante et pour vérifier cela, je ne demande qu’une année pour mettre ça en place, la couverture de ce livre aura construit la justification de son titre. Pour de vrai.
Alors, quel est le responsable d’un département de psychologie qui désire mettre en place une telle initiative ?