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L’objet Féminicide (VII)


Fernando de Amorim
Paris, le 10 juin 2020

Le refus de la séparation est l’indicateur de la fonction de l’objet pour le Moi. L’objet s’oppose au sujet. Il faut entendre objet comme « tout ce qui se présente à la pensée », comme « ce qui est placé devant, ce qui possède une existence en soi, indépendante de la connaissance ou de l’idée que des êtres pensants en peuvent avoir », comme « tout ce qui est doté d’existence matérielle », comme « ce qui est la cause ou le motif d’un sentiment ».

Pour Alexia Delbreil, psychiatre et médecin légiste, « Ce refus de la séparation est spécifiquement masculin [70%] ». Je pense que le refus de la séparation est propre à n’importe quel être parlant. C’est pour cette raison que des femmes tuent aussi leurs conjoints (15 à 20% par an) pour « une cinquantaine d’affaires jugées par les cours d’assises de la cour d’appel de Poitiers ». En revanche, quand il existe un adulte dans l’entourage pour apprendre à l’enfant à supporter la séparation et apprécier les avantages d’être séparé, cela aide l’enfant devenu adulte à supporter la séparation. Dans le cas de la structure psychotique, la séparation équivaut à l’effondrement des parties du Moi. La domination du Moi envers les objets qui se prêtent, vise à utiliser ces dits objets comme colle pour maintenir l’unité du Moi. En s’y prêtant, l’objet devient chose.

De là la question : « Pourquoi les hommes passent-ils à l’acte à ce moment-là ? ». Il me semble important de poser la question aux concernés au lieu d’interpréter, de porter des jugements ou de donner des avis. Interpréter leurs passages à l’acte à leur place, ne leur apprendra pas, et ne nous apprendra pas davantage, sur la haine qui pousse au meurtre.

Penser que « Pour ces hommes, la rupture est une dépossession inacceptable » est une lecture faussée. En revanche, il me semble que parler du Moi de ces hommes, ouvre davantage la porte pour la sensibilisation de la société et l’étude clinique de tels agissements.

Évoquer des « crimes de propriétaires » ne rend pas service à l’étude psychopathologique du psychisme du tueur. En revanche, constater que « le meurtre soit commis de manière différée » est plus instructif car, comme j’avais déjà émis l’hypothèse, précédemment, il faut l’alignement pour le Moi de l’élément déclencheur, de la forclusion du Nom-du-Père et de l’objet perdu à jamais, l’objet a lacanien, pour la manifestation du passage à l’acte.

De là l’importance, en termes préventifs, que la femme s’éloigne une fois la rupture déclarée, qu’elle n’aille pas seule chercher ses affaires, qu’elle évite de rester seule avec l’ancien partenaire. C’est une prudence nécessaire pour la protection de sa vie car la folie ne se contient pas avec la justice, mais avec la force. Si le partenaire est d’accord, la folie peut être castrée par une psychothérapie avec un psychanalyste ou avec une psychanalyse.

Les indicateurs avant-coureurs montent par pallier. Aucun dépassement ne doit être minimisé ou interprété comme insignifiant. Il est important que la rupture se fasse définitivement et sans retour en arrière, au risque de donner des fausses espérances et réanimer le circuit pulsionnel contenu par la police, la justice, la psychothérapie.