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Lettre ouverte à celles et ceux qui au nom d’une « position scientifique », sont contre la psychanalyse


Fernando de Amorim
Paris, le 5 mai 2022

En écrivant dès la première ligne : « Position scientifique contre la psychanalyse appliquée à l’autisme », la brochure « Vaincre l’autisme, le nouveau défi de la recherche » se met le doigt dans l’œil. Les autistes ne sont pas des machines à laver.

Les auteurs de cette brochure, en écrivant que « L’autisme ou les troubles du spectre autistiques (TSA) sont des troubles neurodéveloppementaux/neuropsychiatriques » (p. 2), consolent tout le beau monde lié à l’autisme : les parents, les chercheurs et l’autiste lui-même. Oui, lecteur ami, je pars du principe que l’autiste est pour quelque chose dans sa position subjective. S’il n’est pas considéré sous cette forme, à savoir, en tant que responsable, c’est la voie légume qui s’ouvre à lui. Et la voie légume n’est pas réservée à l’être autiste, c’est une voie ouverte à n’importe quel être qui cède sur la parole, qui ne se rebelle pas contre le désir du Moi et de ses organisations intramoïques.

Comme dit le poète : « Toi qui consoles, toi qui n’existes pas et pour cela consoles » (F. Pessoa, Œuvres poétiques, Gallimard, 2001, p. 365).

Selon les auteurs de la brochure, ces troubles neurodéveloppementaux/neuropsychiatriques « affectent le développement et le fonctionnement de l’enfant dans les domaines de la communication sociale, de l’imagination et du comportement. » (Ibid.). En écrivant cela, ils évacuent la problématique du phallus imaginaire, du désir de l’Autre non barré, de la relation de pouvoir imaginaire du Moi sur l’objet. En un mot, « Les TSA ont toujours une cause neurologique/biologique. » (p. 3). En un autre mot, il n’y a pas de désir du père, de la mère, des deux, et de l’enfant dans l’affaire autistique. Circulez, y’a rien à voir d’autre que le neurologique/biologique.

Être contre la psychanalyse c’est être contre le désir de l’être. La psychanalyse est le bateau qui maintient l’être hors de l’eau de l’inconscient, la psychanalyse est ce qui permet à l’être de repérer le désir de l’Autre non barré et, après une psychanalyse, de construire son désir à partir de l’Autre barré. Est-ce du jargon psychanalytique ? Vous ne comprenez rien lecteur ? C’est comme ça, supportez. C’est comme la virologie ou la physique nucléaire. Il faut des années d’études pour saisir un peu de quoi on cause. En attendant, suivez le guide sans discutailler. Or, quand on arrive à toucher les raisins, le Moi, malin comme il est, s’éloigne en se disant à lui-même : c’est du verjus. Et Esope de conclure : « Pareillement certains hommes, ne pouvant mener à bien leurs affaires, à cause de leur incapacité, en accusent les circonstances ». Ici la psychanalyse.

Je ne pense pas que « vaincre l’autisme » soit au courant de ce qu’est une psychanalyse car je ne pense pas que les autistes peuvent, d’emblée, bénéficier d’une psychanalyse. En revanche, la psychothérapie avec un psychanalyste est très utile pour un être qui désire exister.

Pas plus tard qu’hier, un garçon de 4 ans s’est approché de moi. Sa mère et son père, dans la pièce, ont remarqué aussi que c’était la première fois qu’il était allé vers le clinicien. Avant il rentrait dans ma consultation de manière agressive et anxieuse. Il tapait son père et se tapait. Hier, non ; il a touché mon bras et a collé son ventre à mes genoux. Ce moment, d’une grande délicatesse, a ému tous les présents. Il n’était plus question d’autiste, mais de Pierre qui touchait le corps de l’auteur de ses lignes.

Toute association qui a comme objectif de « vaincre », m’apparaît comme suspecte. Et cela depuis mon plus tendre âge de clinicien quand, dans un service d’oncologie, j’écoutais les membres de l’association « vaincre le cancer ».

Il ne faut pas vaincre l’autisme. L’autisme n’est pas un ennemi. Je préfère, et cela du point de vue du psychanalyste bien évidemment, lire l’énigme de l’autiste. Il ne faut pas perdre de vue que personne, ni les majeurs qui entourent l’autiste – parents, médecins, l’autiste lui-même – veulent savoir sur le désir. C’est leur droit. Mais qu’ils ne viennent pas, par idéologie, empêcher celles et ceux qui désirent savoir sur l’énigme, de venir la déchiffrer et construire une solution pour la vie de l’être chez le psychanalyste. C’est méchant pour l’enfant, c’est jouissif pour les majeurs qui l’entourent. Cela indiffère le clinicien que je suis. Si un parent pense que les técécistes peuvent être utiles à son enfant, qu’il aille les rencontrer sans plus attendre. Ma grande inquiétude est le manque d’autonomie de ces enfants quand ils n’auront plus les parents pour être avec eux.

Il y a une vingtaine d’années de cela, j’avais sollicité des pédiatres afin qu’ils me signalent les premiers signes d’autisme chez les nourrissons et les bébés. Tout simplement pour montrer, avec quelques cas cliniques qu’avec l’aide des parents, il était possible de construire une autre voie pour ces enfants. Aucun n’a répondu à ma demande. Une offre n’oblige pas la création d’une demande car il faut la présence du désir.

Les « anomalies sensorielles » (p. 2), doivent être lues cliniquement comme des signifiants corporels, et non comme « déficience » (Ibid.).

L’ « instinct social » (Ibid.), est propre aux animaux, et non aux mammifères aux prises avec le signifiant – autiste ou non – que nous sommes. L’être humain est pris, à partir du désir de l’Autre barré, dans un désir de parler. Si, bien entendu, il est accueilli convenablement, c’est-à-dire, comme un être à venir. Or, il est su que, futur autiste ou non, le petit d’homme n’est pas bien accueilli par les majeurs. Je vois là une exclusion de l’être non encore parlant à être parmi nous.

Bien entendu je ne vise aucun être humain dans ce texte car il s’agit des enjeux entre le Moi fort, l’aliénation structurelle du Moi, l’Autre non barré (Lacan) et la résistance du Surmoi (Freud), que je rassemble dans l’appellation « organisation intramoïque ». Vous ne comprenez rien lecteur à mon charabia ? Vous ne comprenez pas davantage pourquoi l’autisme a toujours une cause neurologique/biologique. La différence c’est que vous voulez que cela soit neurologique/biologique afin de ne pas être impliqué dans l’opération désirante de l’existence de l’être dans la position autistique. Le Moi se prend toujours pour plus astucieux.

Réduire l’énigme de l’esprit de l’être parlant à des tests neuropsychologiques ((Ibid.), c’est l’autistiser. Ce peu d’esprit des majeurs qui entourent la question autistique est désolant. J’ai toujours été seul, je n’ai jamais aimé la compagnie des autres. Aujourd’hui, ce constat ferait de l’auteur de ses lignes un candidat idéal à être estampillé autiste, schizophrène, psychotique par le premier abruti habile qui passerait par là. Dès ma première rencontre juvénile avec un être du sexe féminin et des camarades intéressants, j’abandonnai toute tentative de rester dans ma coquille. Quand, à la faculté, je retrouve un essaim d’êtres féminins, de bons camarades et la psychanalyse, j’abandonnai définitivement toute tentative de rester seul dans mon coin. C’était un choix qui mène de la jouissance au plaisir. Il faut dire que le monde des majeurs est ennuyeux à mourir. Personne ne se pose la question comme des parents peuvent ne pas donner envie de grandir (avec le consentement de l’enfant bien entendu) ? D’ailleurs, puis-je encore oser poser une telle question ou les hyènes de service vont-elles organiser un assaut mérdiatique contre moi ?

Mon intention n’est pas d’accabler des études autres que psychanalytiques, mais de signaler aux responsables d’associations et aux parents que, eux seuls peuvent, et même doivent, rassembler pédiatres, psychiatres, psychanalystes autour d’eux pour aider leurs enfants, et non prendre parti pour les uns contre les autres. C’est une voie de recherche que j’offre.

Je ne néglige pas les autres troubles possibles chez ces enfants, telle l’épilepsie (p. 3). J’aimerais examiner à quel moment elle se déclenche, dans quelles circonstances. Un temps énorme est perdu au détriment de l’avenir des enfants, du fait de cette médisance calculée contre la psychothérapie avec psychanalyste – différente de la psychothérapie avec psychothérapeute – proposée aux enfants autistes et refusée avec grognement par les fâchés.

Les auteurs de cette brochure veulent des interventions adéquates, un diagnostic le plus précoce possible, « de façon à pouvoir informer les parents et les enseignants des écoles maternelles sur les difficultés cognitives de l’enfant » (Ibid.). L’intention, louable, est de « leur apporter des interventions adéquates. » (Ibid.). Ces interventions visent à améliorer le fonctionnement social de l’enfant » (Ibid.). Toujours louable, mais tout le poids repose sur l’enfant. Et les parents ? Ils ne peuvent pas participer aux efforts de guerre en apportant leur discours chez le psychanalyste ? Il faut que le lecteur puisse envisager que toute cette furie contre la psychanalyse vise à exclure le travail nécessaire et la participation active des parents, c’est-à-dire, apporter leur désir sur la table d’opération psychanalytique. Il est saisissant de remarquer ce qui suit : « … améliorer le fonctionnement social de l’enfant, sa communication ainsi que les autres capacités cognitives, mais aussi à réduire les comportement répétitifs et obsessionnels. » (Ibid.). C’est un certain Sigmund Freud qui, en 1894, avait isolé la névrose obsessionnelle. Je veux dire par là que la rigueur et la recherche scientifique en psychanalyse est chevillée à la science de Freud. Ce n’est pas parce que des psys utilisent des techniques dépourvues de désir que cela fait d’eux des scientifiques. Il faut beaucoup de désir pour faire science.

Un mot sur la phrase qui suit : « De nombreux programmes d’intervention insistent sur l’importance de l’implication parentale » (Ibid). À quoi bon un programme si cette intervention ne vise ni les organisations intramoïques des parents, ni leur désir, ni leur Moi ? Les techniques de dressage sont-elles aptes pour apporter à l’enfant et à ses parents la subjectivé nécessaire pour exister dignement ? Si oui, je m’inscris au prochain cours pour devenir technicien comportementaliste cognitiviste (tcc). Si non, arrêtez de balancer les mots « preuve empirique » (p. 4) et « Position scientifique » (p. 2) à tout bout de champ pour vendre à des parents perdus l’idéologie qu’il est possible de soigner un être humain sans la solidarité décidée du désir des agents.

Les auteurs souhaitent accueillir « l’autisme » (p. 3). Le psychanalyste accueille l’être. S’il est autiste, ce qui est toujours différent d’autisme, le psychanalyste utilisera le diagnostic pour diriger la psychothérapie et non le patient. De même, lorsqu’il est question des déficits cognitifs (p. 3). D’où viennent-ils ? Une telle réponse exige une patience et une minutie auxquelles est entraîné le psychanalyste. Les cinq ans de formation de psychologue, les douze ans de formation de psychiatre ne sont pas suffisants pour que les auteurs de la brochure puissent négliger, en plus des années de formation universitaire, au moins vingt ans de formation psychanalytique, théorie et pratique, sans compter les réunions hebdomadaires, groupes d’études, colloques, congrès qui font le quotidien du psychanalyste. Cela s’appelle le désir. Je ne fais pas ici de lobbying, mais je mets en évidence une compétence au travail et un désir décidé au service des enfants et des parents. Si demander aux auteurs de la brochure le respect des psychanalystes pourrait paraître, pour eux, puéril, je leur demande au moins la considération de leurs tentatives d’amélioration clinique et théorique quotidiennes. Il est impensable de clouer au pilori les psychanalystes d’aujourd’hui pour les erreurs cliniques des premiers psychanalystes. Sauf si la mauvaise foi est de rigueur.

C’est parce que j’aime celles et ceux qui montrent le trou dans la culotte épistémologique que depuis des années le RPH (Réseau pour la psychanalyse à l’hôpital – École de psychanalyse) s’applique à apporter ces preuves légitimement exigées. Quant au nombre des séances, « 4 ou 5 séances hebdomadaires sur plusieurs années, générant des coûts énormes » (Ibid.), il est vrai que le nombre de séances est important, mais cela est dû au Moi fort et aux organisations intramoïques du Moi, qu’il soit autiste ou non. Quand il est possible, le dégonflement du Moi et la castration de l’imaginaire, lors d’une cure, qu’elle soit une psychothérapie avec psychanalyste ou une psychanalyse, se déroule très rapidement. Mais il ne faut pas exiger des méta-analyse en psychanalyse. Il faut comparer le comparable. Il faut demander cela aux scientifiques qui ont comme objet d’étude des objets inanimés, tels les physiciens, ou des objets non parlants et sans désir, tels les souris. Il faut décidément avoir un peu de jugeote scientifique et non balancer le mot « scientifique » comme une insulte à sa maman pendant la récré.

Pour critiquer la psychanalyse, sa πρᾶξις, il me semble important d’avoir un tant soit peu, d’autorité scientificité et une certaine solidité intellectuelle. Popper critiquait la psychanalyse. Mais Popper n’était pas clinicien. Que dire d’un épistémologue qui arrive sur le champ de bataille clinique – bataille entre les organisations intramoïques de l’autiste, ses parents, les associations qui veulent vaincre le pauvre autisme – pour compter les cadavres ? Il ne court aucun risque. Le combat est déjà terminé. Le psychanalyste, quant à lui, lecteur d’Aristote à Kuhn, en passant par ce malheureux Popper, s’applique à répondre aux critiques au nom de l’envie du Moi de tous ses détracteurs Et cela avec un sourire, un merci et un bis repetita placent : s’il a affaire à un savant et non à un abruti.

De même, concernant le nombre d’articles sur la réussite d’une psychanalyse, ce qui m’intéresse le plus ce sont les erreurs dans la conduite d’une cure plus que  la réussite. La réussite d’un traitement est ce qui est attendu d’un clinicien. Il est payé pour être compétent, à condition que les oiseaux de mauvais augure ne plombent pas son travail, en salopant le transfert chèrement acquis, matin, midi et soir.

La CPP (Consultation publique de psychanalyse), a été créée pour recevoir les patients ayant peu de moyens financiers. Cette expérience est très positive et les enfants autistes que mon équipe reçoit, viennent dans ce cadre. L’argument qui veut que la « psychanalyse soit pour les bourgeois » est argument malfaisant d’une époque révolue, d’Ancien régime. Il faut vivre avec son époque.

Si les articles psychanalytiques sur l’autisme sont « purement théoriques » (p. 4), aidez les psychanalystes à travailler avec les enfants, sans mettre de bâtons dans leurs roues. Mettons en place un programme de recherche avec des psychanalystes et surtout sans haine, et dans six mois il sera possible de voir si le projet est viable. S’il ne l’est pas, je signerai avec les détracteurs de la psychanalyse, non que celle-ci soit nulle, mais que je suis incompétent.

Les auteurs cherchent à déstabiliser les psychanalystes en évoquant que « ces articles sont purement théoriques et aucun d’entre eux ne fait état de données prouvant l’efficacité de cette approche dans l’amélioration des symptômes liés à l’autisme. » (Ibid.). D’abord, je ne sais ce qu’« approche » signifie, je connais psychothérapie avec psychanalyste ou psychanalyse. Les autres mots mêlés à la psychanalyse, comme psychiatre-psychanalyste, psychologue d’orientation analytique, sont des arrangements malheureux pour noyer le poisson, à savoir, que le praticien n’est pas vraiment psychanalyste, qu’il a laissé son désir de savoir au bord de la route maritime. Il ne compte pas, pas encore, parmi les psychanalystes. Et c’est regrettable.

Ensuite, il faut signaler qu’évoquer l’autisme et non l’autiste, ralentit, voir empêche sérieusement l’être souffrant de construire son existence. La faute à qui ? Mais à nous tous, celles et ceux qui savent ce qu’il faut faire et ne le font pas. Pourquoi ? Parce qu’ils se comportent en majeurs et non en adultes envers ces enfants.

Les auteurs de cette brochure lisent l’autisme comme s’il s’agissait d’un objet inanimé, type machine à laver ; il y a aussi chez eux une lecture biologique où l’affaire se déroule au niveau médical, génétique. Je propose la visée psychanalytique qui, en assurant la psychothérapie en tant que psychanalyste, vise la construction de l’être dans la position de sujet. Et l’être ici c’est le bébé, l’enfant, le pubère, mais surtout leurs parents. Sans les parents dans l’opération clinique personne ne saura quoi que ce soit sur l’énigme que porte l’appareil psychique du mineur, autiste ou non.

Il ne faut pas confondre la psychanalyse avec qui la pratique. L’autorité de juger une psychanalyste ou une psychanalyse – et non la psychanalyse –, revient à celui qui la vit ou qui l’a vécue, à savoir, le psychanalysant, et non à celui qui se gargarise de la pratiquer.

Affirmer que les enfants se trouvaient « parqués » (p. 6), dans les hôpitaux est une formulation qui indigne parents, soignants, citoyens. D’où l’importance de commencer le traitement avec le psychanalyste le plus tôt possible. Plus tôt se commence la psychothérapie, plus tôt il est possible de voir l’enfant entrer, avec son accord, dans le monde des êtres parlants. Évoquer les « retards de diagnostic » (Ibid.) en France ce n’est pas suffisant. Les associations de parents peuvent mettre sur pied des recherches et à partir de là, montrer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, et cela dans des colloques publiques. Le diagnostic est un moyen de se repérer dans la conduite de la cure, mais n’est pas une fin en soi. J’insiste.

Mettre en évidence qu’« Il a été scientifiquement prouvé qu’un diagnostic précoce et des thérapies (sic !) cognitives et comportementales précoces améliorent le futur de l’enfant et lui permettant d’atteindre un niveau d’éducation et d’intégration dans la société dans la majorité des cas. » (Ibid.), mériterait une étude pour savoir quelle est l’implication du transfert et du désir de l’Autre barré dans la réussite de ces pratiques non psychanalytiques.

Bien évidemment je suis sensible et empathique à la souffrance que les parents vivent, comme n’importe quel parent d’ailleurs car il n’existe pas un manuel pour être parent. En revanche affirmer que les parents sont « accusés d’être la cause du trouble chez ces derniers [leur enfant] » (Ibid.), aujourd’hui frôle le commérage, voire la médisance.

Je n’accuse pas les parents des enfants, que ces derniers soient autistes ou non, mais j’affirme que les parents sont responsables de ce qui se passe avec leurs enfants. Le parent d’un enfant, autiste ou non, est toujours responsable des troubles de son enfant, toujours. En revanche, c’est en se déresponsabilisant, qu’il est possible de remarquer la distinction entre un parent majeur et un parent adulte.

Depuis des années les psychanalystes étudient, recherchent, se plantent… mais n’est-ce pas précisément la marque de faire de la recherche scientifique ? Pour quelle raison dénigrer une clinique qui tire l’autiste vers le haut, vers l’autonomie ?

De toute manière, il faut toujours, pour le Moi, élire un mauvais objet pour haïr. Je préfère d’ailleurs que cette haine bien ordonnée contre la psychanalyse, bien commencée, continue contre elle. Ainsi le Moi de « Vaincre l’autisme » se laissera tranquille. Il aura trouvé dans la psychanalyse son os à ronger. Comme disent les polis en mal de digestion : bon appétit !

Bien sûr que je suis sensible à la demande faite par les auteurs de « Vaincre l’autisme » quand ils écrivent que « les écoles ordinaires doivent être ouvertes aux enfants autistes » (p. 7). Mais les enseignants, comment feront-ils ? Devront-ils sacrifier les enfants non-autistes pour intégrer dans les écoles ordinaires les enfants autistes ? Si un enfant non-autiste n’est pas propre (contrôle sphinctérien), il n’est pas accepté par l’école. En d’autres termes, doit-on supposer un enfant bruyant, turbulent, agressif avec les autres enfants comme ayant plus de droit que les autres ? D’où l’importance de commencer le traitement de l’enfant et des parents avec le psychanalyste dès les premiers indicateurs. Pour préparer l’enfant à être avec ses camarades dès la rentrée des classes. Plus le temps passe, plus les associations se perdent en discussions sans fin et plus sera difficile le processus de sociabilisation qu’ils souhaitent. En d’autres termes, dans une telle logique, il faut remettre en question, voire en doute, l’État, l’école, la psychanalyse, la formation du médecin, du psychiatre, mais pas solliciter la participation active des parents dans la thérapeutique de leurs enfants, au risque de blesser leurs Moi et déchaîner leur foudre rageuse.

Les parents des enfants autistes ne sont pas coupables de la situation de leurs enfants, ils sont, comme n’importe quel parent, responsables de ce qui arrivent à leurs enfants, puisque ces derniers sont sous leur responsabilité. Et ils doivent prendre leur part de responsabilité dans la thérapeutique pour sortir leurs enfants de cette situation. Et cela passe par leur rencontre avec le psychanalyste. Sont-ils d’accord avec l’auteur de ses lignes ? J’en doute. Mais au moins ils savent ce que je pense.

Ce n’est pas la faute des parents, ce n’est pas la faute de l’autre (tels que La France et ses hôpitaux, ses écoles, la psychanalyse), mais c’est de la responsabilité de tous et donc des parents aussi d’apporter l’aide nécessaire à ses enfants. L’aide demandée aux parents de mettre leur main à la pâte n’est pas une comptabilité sacrificielle. Une mère m’avait dit : « J’ai déjà donné ! ». Il s’agit de responsabilité et non de sacrifice. Le discours sacrificiel ne construit pas, le sacrifice détruit. Les parents doivent participer en donnant la main aux cliniciens, en se remettant en question. Ce que les psychanalystes font à la longueur de leurs journées.

Et pour la fin : c’est le pompon ! Les auteurs écrivent ce qui suit : « Le gouvernement a le devoir d’apporter son assistance pour l’éducation et la santé de ces enfants et d’arrêter de se laisser intimider par le lobby psychanalytique. » (p. 7). J’ignore si un quelconque lobby psychanalytique existe, à l’instar du père Noël ou du loup garou, mais si ledit lobby existe, je conseille aux responsables de ce lobby de laisser les parents et leurs enfants avec les thérapies prouvées scientifiquement entre eux.