Fernando de Amorim
Paris, le 2 mars 2025
La détresse de l’être ne doit jamais être négligée. Ses revendications, qu’elles soient au nom de la justice, de la morale, de l’amour ou de la sexualité sont à traiter de la manière la plus bienveillante qui soit, car la souffrance produite par ce que l’être estime constituer une atteinte à l’intégrité de son Moi n’est pas une mince affaire.
La problématique du phallus imaginaire pour une dame qui se présente en lesbienne dure depuis son enfance. Elle se sent diminuée, car la personne qu’elle pense devoir aimer le plus ne l’aime pas. Elle évoque sa femme, puis elle associe à sa mère et disant : « Je me suis coupée de maman ! » Il ne s’agit pas de coupure mais de séparation. Jusqu’à présent, chez cette dame, il s’agissait d’éviter de reconnaître qu’elle et sa mère sont des êtres distincts. Avec cette phrase, elle introduit la castration symbolique. Elle se dit malade de sa famille.
Il s’agit d’une femme qui, grâce à ses hallucinations, se positionne dans la séance de la manière suivante : « Les hallucinations sont contre moi ! » Puis, au fur et à mesure de l’avancée de la séance, toute seule, elle affirme : « Je suis contre moi ! » Cette deuxième phrase donne une tonalité de responsabilité que la première ne porte pas.
Cette absence de tonalité, comme la tonalité de la couleur de l’eau ou de la végétation abondante, indique que la psychanalyse s’approche de la Mer des Sargasses.
Le Nord clinique est toujours le complexe d’Œdipe. Le clinicien doit conduire la cure sur cette voie. Si le Moi, dans le cas du Moi de structure psychotique et portant un diagnostic spécifique de schizophrénie, évite sa Mer des Sargasses, le clinicien accepte qu’elle frôle ladite mer, mais pas qu’elle recule. Une telle opération se fait avec bienveillance, sans une ombre de truculence.
Elle ne veut pas se séparer, puisqu’elle dit : « Je perdure ma mère dans ma vie ! » Une telle logique empêche toute possibilité d’avancée clinique. Elle ne veut pas être hospitalisée ni prendre de médicaments. Elle supporte de venir témoigner de son absence de deuil sur le divan.
Au contraire de se positionner dans une logique d’avant la psychanalyse, quand la psychose, la folie, les névroses étaient traitées de manières inappropriées (internements de très longue durée, bains, voyages en Italie pour ceux qui en avaient les moyens), le psychiatre dispose aujourd’hui de la possibilité de compter avec le psychanalyste pour que l’être puisse construire sa responsabilité de conduire aussi sa destinée, indépendamment de la structure psychique (névrose, psychose, perversion) dans laquelle il navigue, en état d’errance.
Le problème clinique n’est pas la structure psychique, c’est le symptôme qui fait souffrir le Moi, le fait se braquer, paniquer, se renfermer.
Ces postures du Moi empêchent le clinicien de dégonfler le Moi. Si le psychanalyste réussit, il permettra à l’être d’apparaître dans la séance, indicateur qu’il a quitté les jupes du Moi et, se constatant nu, de chercher et trouver étoffe et abri auprès de l’Autre barré.
Le résultat de cette opération est que l’être pourra devenir sujet et même construire sa responsabilité de conduire…