Fernando de Amorim
Paris, le 1er décembre 2024
Un enfant est le résultat du désir d’une femme et d’un homme. Si ces êtres ne reconnaissent pas leur désir, cela n’engage pas la responsabilité du désir de l’enfant. Il y a des enfants qui ne reconnaissent pas leur désir d’être en vie, encore moins celui de devenir sujet. Dans ce cas de figure, le Moi veut se venger d’avoir été mis au monde sans le support désirant du Moi parental. Mais un Moi parental ne peut rien donner d’autre que son semblant narcissique à l’enfant. En fin de compte, c’est, ou ce sera, à l’enfant d’investir sa vie et de construire sa position de sujet.
Un tel argument vise à préparer les êtres à devenir sujet, même si l’environnement ne leur est pas propice.
Un père, de structure psychotique, enseigne à son fils : « Il ne faut pas se faire remarquer. Il ne faut pas parler beaucoup, il faut se fondre dans les gens. Il faut mourir. » Un tel discours n’aide pas l’enfant à devenir sujet. Grâce à la psychanalyse, cet être, maintenant jeune homme dans la position de psychanalysant, peut construire sa subjectivité et même sa position de sujet. Tel est le désir du psychanalyste.
Un mot est seul, la parole est dite, le signifiant est ce qui, en s’articulant avec un autre signifiant, fait en sorte que l’être devienne sujet. Ce jeune homme, après avoir rendu visite à trois psychologues et deux psychiatres, vient chez le clinicien, car il souffre dans son couple. Il n’arrive pas à faire le deuil d’une relation conjugale malheureuse.
Sa famille est dispersée parce que l’amour n’est plus, selon ses dires. Il s’accroche à ce qu’il appelle « le triste sort de mes parents ! ». Il est important de mettre en évidence que le Moi est le masque qui cache l’être. Les majeurs ne sont pas des adultes, ils sont des expressions de leur Moi.
Il dit avoir fait un AVC, un arrêt vasculaire cérébral. Il dit que son histoire, à entendre le signifiant, organise une maladie organique pour dire ce qui n’a pas été dit, à entendre le refoulé. Il continue : « Mon cancer est mon armée à moi. »
Encore lui : « Les praticiens, les psys, qui parlent sont des excellents maîtres, mais de piètres cliniciens. » Sortant de la bouche d’un être qui porte deux maladies et n’a pas beaucoup de perspective de vie, cette formule a une valeur particulière.
Pour lui, le suicide est une forme de vengeance. Il faut affiner cette affirmation : il y a le suicide tranché, si j’ose écrire, le définitif, le réussi ; il y a aussi la tentative. Dans le premier, le Moi (a) s’adresse à l’Autre (A) ; dans le second, le Moi adresse sa vengeance à l’autre (a’). La haine qui n’a pas pu, surtout pas voulu, être dite par le Moi justifie le passage à l’acte.
Exclure la haine, la pulsion de destruction – comme le font les médecins et les psychistes (psychiatre, psychologue, psychothérapeute et analyste) – de la formation de la maladie organique ainsi que du passage à l’acte est un manquement à l’étude clinique de l’appareil psychique humain.