Fernando de Amorim
Paris, le 8 décembre 2024
L’exigence n’est pas du même registre que l’obsession. L’exigence est une forme de rigueur qui pousse à la minutie ; l’obsession empêche le travail de se réaliser. Quelques personnes font une psychanalyse avec une visée bien précise ; une de ces personnes dit qu’elle est venue en psychanalyse avec l’espoir qu’un pénis sorte dans son corps.
Le lecteur pourra penser qu’une telle espérance est exceptionnelle. Que nenni.
Le Moi vient rencontrer un psychiste – qu’il soit psychiatre, psychologue ou analyste – comme n’importe quel autre professionnel de santé, avec des objectifs bien précis qu’il se garde bien d’avouer.
Seul le psychanalyste sait mettre en évidence la demande du Moi.
Pour arriver au vrai de l’être, il est nécessaire que, d’abord, le Moi se dégonfle. Il se dégonfle parce qu’il n’en peut plus de souffrance et par amour de transfert.
Quand l’être pointe son nez dans la cure, s’il est prêt à perdre ce qu’il n’a pas – son épouse, son fils, son corps, sa vie –, il sera à point pour frapper à la porte de l’Autre barré. Il entre nu et sort habillé avec des signifiants portant le sceau du manque.
Quand l’être parle, il parle manque, il reconnaît le manque, c’est cela qui constitue la construction de sa subjectivité, jusqu’à sa position de sujet.
Quand un monsieur dit avoir l’impression de ne pas avoir d’identité, il n’a pas complètement tort. Celui qui a une identité, c’est le Moi ; c’est celle de son prénom, de son nom de famille, de sa pièce d’identité.
Il est fascinant de voir avec quelle aisance le Moi installe, sur une pièce d’identité, le signifiant female pour indiquer une femme, ou l’usage du mot baby. Dans le premier cas, la femme est au niveau de l’animal ; dans le deuxième, le mot indique le nain du duc de Lorraine, qui a vécu au milieu du XVIIIe siècle.
Cette manière de reconnaître l’autre a des conséquences ravageuses dans la constitution de son image corporelle et de son être.
Ainsi, tel patient ne vient pas en séance et dit que c’est à cause de la grève des transports. Il dit : « Au fur et à mesure de la journée, je devenais triste ! »
Cette tristesse est due au fait qu’il a cédé sur son désir. L’unique raison d’être en vie pour un être humain est de devenir sujet.
Cela passe par une psychanalyse personnelle.