Fernando de Amorim
Bellevue, le 6 août 2024
Un adolescent, puisqu’il se présente ainsi, dit : « Je veux mourir un jour pour ainsi réaliser mon désir ! ». De toute évidence, dans sa souffrance colérique, il ne s’est pas rendu compte du vrai de ses dires. Le désir est manque, il est irréalisable.
Pourtant, c’est le désir, dans son organisation symbolique, qui permet à l’être de devenir quelqu’un : adulte, femme, homme, sujet, voire psychanalyste. Il continue : « Il faut que je me coltine cette expérience qui est la vie, qui est d’être en vie ! ». La différence entre les dires de ce jeune penseur et l’immense majorité de ses compatriotes humains est que ces derniers ne sont pas, ne seront peut-être jamais à ce niveau de réflexion sur ce qu’est la position de l’être humain dans son rapport au Réel. D’où vient son idée ? Cela ne m’intéresse pas.
Ce qui est important, c’est qu’elle fait partie de l’appareil psychique freudo-lacanien. La pensée, ce n’est pas du Réel, c’est de l’Imaginaire. La recherche et la clinique médico-chirurgicales humaines doivent s’intéresser au Symbolique et pas seulement au Réel pour éviter ainsi de se noyer dans l’Imaginaire, produit par excellence du Moi et que l’être, lâche par structure, n’ose pas contester. Sauf quand il entre en psychanalyse. Les symptômes psychiques, somatiques et organiques, une fois le transfert et l’association libre installés, ouvrent la voie vers la mer d’Œdipe. Une pensée a produit chez le jeune pubère un « sentiment d’horreur ». Quelle pensée avait précédé ce sentiment d’horreur ? demandé-je. Il ne parvient pas à accéder à la pensée, mais évoque une perception, un sentiment, un affect. Il dit : « J’ai du mal à être femme : ça m’impressionne trop. J’ai envie de fantaisie, rigolade, légèreté. Mais j’attends que l’autre me pousse à grandir ! ». La difficulté pour le Moi de ce jeune homme souffrant d’un burn-out, comme il s’est présenté, est que son Moi refuse, pour l’instant, d’honorer la beauté de son sexe.
Cette remarque concerne le sexe du petit garçon comme le sexe de la petite fille. Usager de drogue pour éviter son monde, ce jeune souffre aussi de troubles anxieux. Il se dit paranoïaque : « Je pars du principe que les gens pensent et parlent mal de moi ! ». Seule la suite de la cure, qu’il s’agisse d’une psychothérapie – position dans laquelle il se trouve – et surtout d’une psychanalyse, pourra valider son autodiagnostic. Il se fait des tatouages Malabar. Il faut mettre en évidence que ces tatouages n’ont pas la même fonction que ceux qui percent la peau. Ces derniers ont une signification que seule la cure dévoilera. Argumenter que le piercing, les tatouages, les épilations intégrales des êtres du côté homme sont admises socialement n’est pas un argument clinique, comme a voulu me convaincre un qui se présentait en tant que psychologue clinicien. Tout ce qui porte souffrance au corps est un élément qui pousse le clinicien à examiner les raisons d’une telle décision. Il dit : « Il y a un trou dans la raquette, comme si le fil était coupé. J’ai le sentiment de me liquéfier ! ». Ces remarques exigent du clinicien la plus grande prudence. Le diagnostic structurel n’est pas au rendez-vous clinique, mais les balises sont déjà là.