Fernando de Amorim
Paris, le 10 juillet 2022
Depuis quelques semaines, nous sommes confrontés aux symptômes de la variole du singe. Ces symptômes sont : « fièvre, maux de tête intenses, douleurs musculaires, douleurs dorsales, fatigue, gonflement des ganglions lymphatiques, éruption cutanée ou lésions. L’éruption cutanée apparait généralement un à trois jours suivant l’apparition de la fièvre. Les lésions cutanées sont généralement plates ou légèrement en relief ; elles peuvent contenir un liquide clair ou jaunâtre, puis former une croûte qui se dessèche et finit par tomber. Le nombre de lésions varie de quelques-unes à plusieurs milliers. L’éruption cutanée se concentre généralement sur le visage, la paume de la main et la plante des pieds. Des lésions peuvent également apparaitre au niveau de la bouche, des organes génitaux et des yeux. En général, les symptômes disparaissent spontanément au bout de deux à quatre semaines sans traitement. » (Source OMS).
Au moment de se mouiller pour de vrai, c’est-à-dire, au moment de répondre à la question « Quelles sont les personnes à risque ? », voici ce qu’il est possible de lire comme réponse : « Toute personne qui a un contact physique étroit avec une personne présentant des symptômes de la variole du singe, ou avec un animal infecté, présente un risque élevé d’infection. Les personnes vaccinées contre la variole sont susceptibles de bénéficier d’une certaine protection contre la variole du singe. Cependant, il est peu probable que les personnes les plus jeunes aient été vaccinées contre la variole, car la vaccination contre cette maladie a cessé dans le monde entier en 1980 lorsque la variole a été déclarée première maladie humaine à avoir été éradiquée. Si les personnes vaccinées contre la variole bénéficient d’une certaine protection contre la variole du singe, elles doivent toutefois prendre des mesures de précaution pour se protéger et pour protéger les autres.
Les nouveau-nés, les enfants et les personnes atteintes d’un déficit immunitaire sous-jacent courent le risque de développer des symptômes plus graves de la maladie et d’en mourir. Les soignants sont également plus à risque en raison de leur exposition prolongée au virus. » (Source OMS).
Voilà le politiquement correcte qui aliène et trompe. Pas un mot pour les personnes à risque, à savoir, « hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, personnes transsexuelles ayant des partenaires sexuels multiples, personnes en situation de prostitution, professionnels des lieux de consommation sexuelle » (Source BFM).
Ici aussi pas un mot sur la prévention, mais sur le « public concerné par la vaccination » (Source BFM).
En d’autres termes, le message passé aux personnes à risque est : « Continuez à vous comporter en aliéné ou en jouisseur ». Ma politique clinique, puisque je commençai ma vie hospitalière avec le SIDA, se résume à un slogan : « dans le cas du SIDA, la thérapeutique est la prévention ». Aujourd’hui je peux élargir ce slogan à la maladie ci-dessus citée.
Les institutions sanitaires traitent l’être parlant comme un mammifère, avec le consentement des intéressés, bien évidement. Personne ne met en évidence que le Moi, l’être et la structure s’alignent pour jouir (c’est-à-dire, combler l’objet pulsionnel).
Et pourtant la communauté gay s’inquiète, selon BFM : « Ça se rapproche et rien n’est fait ».
Et pourtant, il y a à faire et notamment attirer l’attention du Moi sur les risques qu’il prend à jouir de l’aliénation (dans le cas du Moi pervers), ou de jouir tout simplement (dans le cas de l’être pervers), car ce dernier pense qu’il peut jouir sans limite et sans conséquence.
Et pourtant, il y a un prix à payer, même pour la jouissance. Je peux même ajouter, surtout pour la jouissance. La jouissance ici c’est la libido propre aux organisations intramoïques. À distinguer du plaisir comme résultat de l’être castré par l’Autre barré, ou encore l’expression de l’Autre barré qu’il est possible de trouver dans un agencement signifiant qui débouche sur une poésie, une toile, une chanson.
La communauté homosexuelle crie à la discrimination, « comme avec le SIDA », m’avait dit un patient. Le même interroge : « Pourquoi tous les homosexuels n’ont pas la variole du singe ? »
Il faut dire que l’homosexualité est un choix sexuel de l’être, tout comme la structure psychique qu’il utilise pour lire le Réel.
Discriminer quelqu’un pour son choix sexuel est aussi stupide que de reprocher à quelqu’un la couleur de sa peau ou son lieu de naissance.
Cependant, le choix sexuel ne doit pas empêcher le clinicien d’examiner s’il s’agit d’un choix structurel (de l’être) ou symptomatique (du Moi). De même pour le discours sociétal où les garçons se pensent filles et où celles-ci se croient garçons. Comme pour les autistes, il faut examiner du côté du Moi et des organisations intramoïques des parents. Mais pour cela il faut aussi du courage, ce que les psys n’ont pas, pas plus que les journalistes et les politiciens puisque tous tiennent mordicus au politiquement correct qui fait mauvais ménage avec le courage. Pour me limiter aux psychistes, ce courage est pourtant exigé pour assurer la conduite d’une cure, qu’il s’agisse d’une psychothérapie ou d’une psychanalyse.
Donc, la sexualité est un choix de l’être. Supposons que l’examen est fait et que le choix de l’être soit effectivement l’homosexualité. Il faut rappeler au lecteur que personne n’est homosexuel, ni hétérosexuel d’ailleurs, matin, midi et soir. Ce qui m’amène au Moi de l’être.
Le Moi peut être psychotique, névrosé ou pervers. Le pervers en tant qu’instance ou structure, cherche la jouissance à tout prix. Seul l’examen clinique pourra attester si, oui ou non, le Moi, malléable par amour de transfert, peut céder de la jouissance au nom de la castration. Il est su que cela, céder de la jouissance, est impossible pour la structure perverse. Sauf quand l’être accepte de faire une psychanalyse jusqu’à son terme, ce qui est rare.
La structure, c’est-à-dire, la voie par laquelle l’être lit et interprète sans changement possible le Réel, est psychotique, névrotique, perverse.
Maintenant la réponse à la question « Pourquoi tous les homosexuels n’ont pas la variole du singe ? ». J’observe qu’elle était valable avec le VIH, car tous les homosexuels n’ont pas attrapé le virus et cela parce qu’une fois les informations cliniques acquises, ces patients se protégèrent avec des préservatifs, en évitant les endroits où les risques sont reconnus de toute évidence clinique, tels que sauna et bains homosexuels, les bordels et les échanges effrénés de partenaires sexuels.
Discriminais-je les homosexuels pour autant ? Je ne m’occupe pas de la vie sexuelle des gens, ce qui m’intéresse c’est l’étude de l’appareil psychique et la circulation libidinale ainsi que la recherche de l’objet par la pulsion.
Pour quelle raison je n’ajoute pas d’autres choix sexuels que l’homosexuel et l’hétérosexuel ? Parce qu’il s’agit de dérivatifs de l’homosexualité ou de tentatives de réponse du Moi au désir de l’Autre.
Maintenant, je propose le tableau ci-dessous :
Choix sexuel | Moi | L’Être |
Homosexuel | NévroséPsychotiquePervers | Structure NÉVROSEStructure PSYCHOSEStructure PERVERSION |
Hétérosexuel | NévroséPsychotiquePervers | Structure NÉVROSEStructure PSYCHOSEStructure PERVERSION |
C’est la discrimination sociétale qui nomme le SIDA « cancer gay », toujours elle qui aujourd’hui nomme la variole du singe comme « maladie des homosexuels ». Or, comme tous les homosexuels ne sont pas contaminés, je pense que les contaminés sont des homosexuels ayant un Moi psychotique ou pervers et de structure psychotique ou perverse.
Le lecteur a remarqué l’exclusion du Moi du névrosé de mon schéma. La raison en est que le Moi du névrosé n’a pas la compétence pour jouir de la transgression à l’instar du Moi du pervers. Le Moi du névrosé jouit de l’interdit, mentalement, par la voie du fantasme, « dans sa tête », comme il est dit familièrement.
Le Moi du névrosé ne peut avoir comme structure que la névrose. Les semblants de délires ou d’hallucinations sont, en fait, des projections fantasmatiques et des comportements déviants du Moi.
Le Moi homosexuel dans la névrose est inhibé. Le choix peut être effectivement ancré, mais la structure n’est ni la perversion ni la psychose.
Dans le cas du Moi psychotique, nous avons d’abord la constitution psychotique du Moi, ensuite le choix sexuel, ancré dans une relation indéniable avec l’Autre maternel. La structure est la psychose avec un comportement apparent de névrosé, telle la timidité. Le Moi peut se comporter de manière perverse, comme dans le cas des comportements masochistes.
Dans le cas du Moi psychotique ayant une structure psychotique, il est exigé du clinicien qu’il lui rappelle lui avoir déjà attiré l’attention sur l’importance de prendre soin de son corps et de l’autre. Ces rappels doivent être faits gentiment et sans brusquerie, à la différence de ce qui se fait avec le Moi pervers, où la brusquerie courtoise et ironique peut bouger les lignes de l’aliénation haineuse. Quant à l’être pervers, la volonté de détruire l’autre, de le contaminer au nom de la vengeance, autorise le clinicien à mettre en évidence la haine et à ne pas se dérober face aux provocations. Avec rigueur, autorité et retenue, sans ironie.
Si le clinicien a, de par l’examen de la certitude, la preuve qu’il s’agit d’une psychose, la structure servira au clinicien pour que ce dernier puisse conduire la cure (diagnostic structurel). Cependant, le Moi peut continuer à se balader dans les séances à faire semblant avec des comportements stéréotypés, que ces derniers soient propres à la névrose ou à la perversion. Seul le diagnostic structurel de psychose pourra autoriser le clinicien à traiter le Moi selon sa structure. La psychose, en tant que structure, peut être voilée par un Moi qui fait semblant d’être névrosé ou pervers. C’est par la castration que le clinicien pourra aligner le Moi à sa structure. Cela peut prendre du temps mais c’est ce qu’il faut faire pour que la cure arrive à bon port.
Le choix homosexuel peut donner à voir un Moi pervers, par sa difficulté à respecter la loi de la castration symbolique. C’est ici que je reconnais le Moi qui se fait contaminer par des maladies sexuellement transmissibles à répétition. Le Moi aliéné, voire l’être jouisseur, compte avec la médecine pour continuer à jouir sans s’interdire. S’il s’agit d’un Moi où l’être est de structure perverse, le clinicien doit signaler qu’il, le Moi, joue avec le feu. Cette remarque sera oubliée rapidement par le Moi. C’est alors que le clinicien se doit de signaler qu’il avait déjà signalé au Moi l’importance de prendre soin de sa vie, de son corps. Le Moi réagira probablement en se plaignant du discours moralisateur du clinicien. Ce dernier se doit de réagir sans tarder en rappelant qu’il s’agit là de son travail. L’être de structure perverse ne veut rien entendre. Il lui faut une rencontre avec le Réel – être effectivement contaminé – pour que le Moi, peut-être, s’inscrive dans une castration caractérisée par la précaution ou diminution de sa frénésie sexuelle intramoïque.
Le Choix sexuel, associé à la structure de l’être et son Moi, quand ils sont alignés, offrent une plus grande potentialité au passage à la contamination, ou plus simplement :
Choix sexuel + Structure de l’être + Moi aliéné = contamination.Cette formule vise simplement à attirer l’attention sur le fait qu’il n’est pas possible de faire de la médecine sans prendre en compte l’aliénation du Moi, la structure psychique par laquelle l’être lit le monde et la jouissance des organisations intramoïques