Fernando de Amorim
Paris, le 18 décembre 2021
La clinique avec le malade de médecine et chirurgie exige du psychanalyste des maniement dans la conduite du transfert.
Hypothèse
Il me semble que chaque expression dans le corps humain justifie que le clinicien, dans la position de psychanalyste, puisse impliquer celui qui souffre, dans la thérapeutique. Quelle est donc l’hypothèse quand la malade souffre d’une endométriose et que les médecins ne trouvent pas un apaisement avec leur arsenal pharmaceutique ou une explication physio-anatomique ?
Théorie du déclenchement
Pour qu’il soit possible d’avoir un déclenchement de la douleur, sans cause organique avérée, il est nécessaire que le Moi trouve un alignement de 3) l’événement Réel (événement qui échappe au contrôle du Moi), le 2) forclusion pour le psychotique, manque pour le névrosé et le pervers, β) Complexe d’Œdipe et 1) perte de l’objet a.
Sans cet alignement, il est possible d’avoir (3), l’événement Réel, sans pour autant avoir de déclenchement (la flèche rouge qui traverse le « 3 » et part vers le haut).
Légende : (cf.photo illustration).
Spirale : la vie, ses hauts et ses bas.
t : le temps.
s : l’espace.
1 : objet perdu.
2 : forclusion.
β : Mer d’Œdipe.
3 : évènement Réel
α : ligne d’alignement que produit, pour le Moi, le débordement du vase.
Moi : la lecture (perception, sensation) aliénée du Réel et de la réalité de la vie.
Le Moi se trouve ainsi pris entre deux représentants du Réel – donc de l’impossible – dans sa vie, à savoir, un événement qui échappe radicalement au Moi actuel (3) et l’objet perdu de son enfance (1).
Dans le cas de diagnostic structurel de psychose, entre complexe d’Œdipe et perte de l’objet a, se trouve la verwerfung, la forclusion, le rejet du signifiant du Nom-du père par le Moi. Ce rejet a comme objectif, toujours pour le Moi, d’éviter la rencontre du manque structurel propre à l’être. Pour éviter la rencontre avec la forclusion, le Moi peut utiliser la douleur et la maladie comme bouche trou, et ainsi éviter la perception de tomber dans le vide. Dans le cas de la névrose ou de la perversion en tant que structure, le Moi aura toujours affaire au manque, ce qui produira chez lui, inhibition, symptôme – psychique, corporel ou organique – ou angoisse, mais toujours avec l’intention d’éviter le manque.
Technique
Je pense que le clinicien doit exiger – sans être lourd – de la patiente, des associations libres rigoureuses de chaque expression de la douleur ; les mots issus de la bouche du médecin et qui ont fait écho chez elle (je pars du principe que « l’Autre barré du médecin interprète » sans que le Moi de ce dernier soit au courant), ainsi que les lieux dans l’organisme de la femme produisant gêne ou douleur. Chaque mot de la patiente lui faisant écho doit passer par la passoire de l’association libre. Cette technique vise à séparer l’ivraie, le signifiant sans importance pour l’actuelle situation, du bon grain, les signifiants à la queue leu leu, qui produisent l’apaisement. C’est le discours de la patiente qui confirmera, telle une boussole, que la conduite de la cure par le psychanalyste est sur la bonne voie. Une fois que la patiente trouve un certain apaisement, le psychanalyste lâche la pression – le « chaque expression » évoqué plus haut, pour ainsi permettre que les associations libres se fassent de belle manière.
Cette démarche de partenariat n’est possible qu’avec la présence désirante d’au moins quatre agents (au milieu du XIVe siècle, on parlait d’une force agissante, un principe d’action) : le discours de la patiente dit librement, le discours du médecin interprété par la patiente, le discours du psychanalyste dans sa visée œdipienne et de castration, et l’Autre barré comme lieu d’où la parole tombe comme un fruit mûr et qui castre le Moi de sa jouissance, diminuant ainsi ses prétentions à devenir bœuf (selon la fable de J. de La Fontaine) et dégonflant l’imaginaire.
Chaque expression de la maladie dans l’organisme doit être associée librement par la patiente. La visée est qu’elle ne subisse pas le Réel sans mot dire, sans son mot – bien dit – à dire. Pour cela elle associera ses lieux organiques pour que l’organisme devienne corps.
Quelle est donc l’hypothèse de la malade souffrant d’endométriose, d’un cancer ou d’une quelconque douleur et pour lequel les médecins ne trouvent pas un apaisement pharmaceutique ou une explication physio-anatomique ? L’interprétation : pour que l’organisme s’apaise le Moi doit en faire un corps en recourant notamment aux associations libres. Pour cela, l’Autre barré doit dégonfler l’Imaginaire et castrer le Moi. Cela passe par la fantasmatisation de l’organisme quand la personne est en psychothérapie, et par la corporéification de l’organisme quand elle est en psychanalyse. L’interprétation en psychanalyse, tombe comme un fruit mûr et produit un effet de découverte ainsi qu’un apaisement de la douleur, selon l’expérience clinique d’un des membres du RPH (S. D.).