Fernando de Amorim
Paris, le 10 juin 2022
La méthode psychanalytique n’établit pas de lecture entre deux phénomènes. Seul le psychanalysant pourra faire de telles connexions.
La statistique psychanalytique concerne le un par un et non les êtres par taille, maladie ou espèce comme en botanique ou zoologie. Et cela pour la simple raison logique qu’il n’existe pas deux êtres humains égaux, pas même les jumeaux monozygotes et la raison est toute simple : l’être humain vient au monde l’un après l’autre. Si un nourrisson est né à 12h 57 et son frère jumeau monozygote est né la seconde d’après – que les gynécologues obstétriciens me pardonnent –, le premier est marqué du sceau de l’aîné. L’enchaînement de ce signifiant maître pour le premier, ainsi que pour le second, marquent leurs différences radicales dans leur relation à l’autre, à l’Autre, ainsi que dans leur rapport au Réel. S’il est possible de mesurer l’intensité lumineuse d’une étoile en astronomie, il est tout à fait impossible de parier sur le fait que le second sera moins lumineux que le premier ou qu’il aura une réussite économique défavorable car chez les êtres parlants, c’est après la mort qu’il sera possible d’évaluer la vie, voire l’existence d’un être parlant. Les faits dans la méthode psychanalytique seront examinés à partir du discours de l’être. Ces faits seront subjectifs, de là l’importance de ne pas se précipiter. Combien de personnes se disent violées dans leur enfance qui, après examen des dires, il s’agit parfois d’un fait d’histoire qui mérite l’intervention policière et judiciaire et, parfois, il s’agit d’un fantasme, voire un délire articulé à sa relation au désir de l’Autre non barré. La vérification de l’authenticité des faits exige une prudence et une prise de temps qu’aucun professionnel, juge, policier, avocat, n’a les moyens d’en faire usage. Seul le psychanalyste est capable d’examiner et d’exiger le respect du temps subjectif pour l’être de distinguer son désir du désir de l’autre, son semblable, de l’Autre, son tyran intramoïque. Ce temps est logique, il n’est pas imposé par les injonctions des tribunaux, les demandes de papier justifiant les faits par les avocats ou les aiguilles de la montre. La crédibilité des dires viendra avec l’apaisement de l’être et non avec des volontés de vengeance. Et cette donnée est aussi la preuve que le clinicien à affaire à l’être ou au Moi.
La méthode psychanalytique se dégage donc, de toute tentative psychologique, sociologique ou sociétale de lecture du Moi. Elle vise à ce que ce que l’être arrive à son bon port à lui, ce qui suppose la traversée de l’imaginaire, le dégonflement du Moi et la castration de l’être, ce qui l’installera dans la position de sujet.
L’inconscient, ainsi que le désir de l’Autre, sont des langues étrangères pour le Moi.
Cet ensemble cohérent de techniques et de respect de règles établies par l’expérience pour le psychanalysant et surtout pour le clinicien – que ce doit de respecter l’habitude du silence, la conception de sa propre castration et son application au sens strict (stricto sensu) –, constituent la méthode psychanalytique. Le respect de cette méthode pourra apaiser les souffrances psychiques, corporelles et organiques de celles et ceux qui ont fait cet appel à l’aide.
Enfin, la méthode psychanalytique est une manière particulière d’appliquer une médication. Cette médication est une écoute de l’être, à condition de pousser gentiment mais fermement, le Moi hors de la lumière de la séance. C’est par cette stratégie qu’il sera possible d’introduire la castration qui fera l’être s’accrocher à deux signifiants et devenir ainsi sujet. C’est grâce à cette écoute qu’il sera possible de construire sa route de fond qui mènera le bateau psychanalyse, avec le psychanalysant et le style du supposé-psychanalyste à son bord, jusqu’au terme du voyage (continent pour la névrose, possibilité d’une île pour la psychose, mouillage pour la perversion).