Fernando de Amorim
Paris, le 23 décembre 2024
Ce n’est pas avec l’hypnose ou avec une psychothérapie pratiquée par un psychologue ou un psychiatre que le clinicien réveillera l’agressivité, la colère, voire la haine que le Moi évite à cœur et à cri.
La visée du réveil du transfert négatif est de produire un effet de castration pour que le Moi se dégonfle et que l’être se barre.
Il est important que cette agressivité ne se retourne pas contre le clinicien. Si c’est le cas, ce dernier doit mettre un terme à la relation thérapeutique, car le Moi du malade, du patient ou du psychanalysant se refuse catégoriquement à lâcher son os, à savoir la haine envers l’objet de transfert, c’est-à-dire le clinicien. Il – le Moi – sait que s’il lâche l’agressivité qui est la sienne envers le clinicien, il sera obligé de reconnaître que ce dernier n’est pas la source de sa haine.
Le Moi insiste pour maintenir la relation imaginaire car, ainsi faisant, il obstrue toute possibilité de savoir que sa haine de l’homme n’a pas commencé avec le psychanalyste, le petit ami ou l’époux. Cette haine a commencé dans son enfance, mais le Moi la nourrit au quotidien pour faire de la vie de l’être et de ses semblables un enfer.
La stratégie pour dénouer le transfert négatif et pour que l’être produise un savoir puis construise sa responsabilité de conduire aussi sa destinée consiste à :
Dans un premier temps (Fig. 1), que le clinicien repère que cette agressivité lui est adressée sans qu’il y soit pour quelque chose, à part d’être le support pour le Moi aliéné. C’est la base même du transfert. Comme évoqué plus haut, le clinicien doit éviter d’occuper cette position. Un Moi m’avait dit un jour : « Vous me traitez comme quand vous m’avez connue, petite fille ! ». L’aliénation du Moi exclut la réalité scientifique du fait. Je n’ai pas connu cette dame quand elle avait cinq ans. Je suis accusé de tous les maux sans pour autant y avoir pris part, mis à part dans le monde imaginaire que son Moi a inventé de toutes pièces et qu’elle ne lâche guère ;
Dans un deuxième temps (Fig. 2), la visée clinique est que le Moi interpelle, par les associations libres, le registre de ses organisations intramoïques. Il s’agit de traverser, par le verbe associé librement, ledit registre ;
Dans un troisième temps (Fig. 3), le clinicien constate la présence du verbe vrai associé librement grâce aux associations libres, c’est-à-dire avec la production d’un effet : travail, réussite, construction d’un style ;
Dans un quatrième temps (Fig. 4), est constatée, pas forcément par le psychanalysant mais sûrement par le clinicien, l’association libre vraie, celle qui construit des effets chez l’être. Cela n’est possible qu’en psychanalyse.
Je dois admettre que ces quatre opérations sont impossibles sans l’accord de l’être, car le Moi est capable des manœuvres les plus amusantes : tomber malade, inventer de toutes pièces une sortie de psychanalyse, refuser catégoriquement autrui, avoir toujours raison tout en niant, voire en méprisant l’autre. Ces manœuvres visent à éviter la castration et la construction de sa responsabilité de conduire aussi sa destinée. Ce refus radical d’apprendre – car, pour apprendre, il faut se reconnaître ignorant – est le pain quotidien des psys, psychologues, psychiatres, psychothérapeutes et analystes ; ce refus ne devrait pas nourrir la bouche d’un psychanalyste.