Fernando de Amorim
Paris, le 5 juin 2020
Le Moi du père, le Moi des proches voyant la situation de harcèlement de la jeune femme n’osaient pas intervenir. Un proche avait dit : « J’avais arrêté de fumer à l’époque, mais j’ai repris. C’était la cigarette ou je lui cassais la gueule ». Un gendarme en réponse à la question « Ça se soigne, cette jalousie maladive ? L’homme répond : “Oui, avec une balle” ». Il est important de mettre en évidence l’impuissance de la psychologie, tout en entendant qu’il faut de la force pour freiner la volonté de détruire l’autre. Ainsi, je pense qu’il faut éviter d’arriver aux extrêmes. De là l’importance de la prévention. Et la prévention est du côté des parents dans un premier temps, quand les enfants sont encore chez eux. Du côté des femmes quand elles sont majeures et commencent leur vie de couple. Dès la première insulte, il faut exiger du respect de soi et de son corps. Tout en prévenant qu’il n’y aura pas de second avertissement. Si une femme passe à côté de cet avertissement, elle laissera la porte ouverte au déchainement pulsionnel des organisations intramoïques et du Moi fort du conjoint.
Si le Moi se comporte en jaloux, cela doit inciter une femme à s’éloigner, au plus vite, de ce mauvais parti. Si elle reste, c’est parce que son Moi tire un bénéfice de voir matérialiser son Autre non barré avec des paroles blessantes et sa résistance du Surmoi sous forme de coups de poing et enfin coups de couteaux.
Évidemment, ceci ne se passe pas dans un registre conscient, donc, inutile pour le lecteur de crier au scandale, à savoir, que je déresponsabilise le criminel ou que je culpabilise la victime. Cependant, il faut avoir présent à l’esprit qu’en choisissant de rester dans cette relation, le Moi fort de la femme maltraitée devient maître dans le couple.
Le Moi d’un homme qui ne travaille pas et qui veut que sa femme reste à la maison pour l’avoir à l’œil est un Moi qui ne va pas bien. Pour quelle raison le Moi d’une femme choisit de rester avec un tel homme ? Pour le protéger, pour le nourrir, en un mot, pour exercer une emprise sur lui. En clair, le lecteur aura affaire à deux Moi aliénés qui forment un couple à la merci de leurs instances intramoïques.
Preuve en est lorsque les parents de la femme veulent voir leur petit enfant nouveau-né : la femme accepte de se réconcilier avec ses parents, à condition qu’ils acceptent aussi le mari qui l’insulte, l’agresse. Lire le comportement de la victime par la voie passive est une aliénation supplémentaire à leur condition. La visée doit être de la subjectiver et cela passe par la castration de son imaginaire.
Quand le Moi sent qu’il est en train de perdre du terrain dans son emprise sur l’autre, il se marie, lui fait un enfant. S’agit-il de manœuvres du Moi pour fortifier sa position ? Possible, mais il ne faut oublier que l’autre tire un bénéfice à acquérir un phallus sous forme d’enfant. Et cela indépendamment du fait qu’il s’agisse de la position de père ou de mère.
Une fois que le Moi fort possède sa proie, à savoir l’autre, il peut se permettre, grâce au consentement de ce dernier, de lire les courriels, les SMS, et « consulter son journal d’appels et à examiner les factures détaillées ».
En proposant que l’autre fasse la même chose avec lui, à savoir d’examiner son téléphone, le Moi sait qu’il n’a rien à cacher, parce que le secret n’est pas qu’il puisse avoir une maîtresse, il l’a déjà, mais de dévoiler le désir inavoué. La maîtresse qu’il a est son épouse ; elle incarne, pour lui, le Moi, l’Autre non barré.