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Politique psychanalytique

Politique psychanalytique

pour la construction d’un discours porté par les Français

Fernando de Amorim

Paris, 3 octobre 2022

Pour Mahsa Amini

in memoriam

Le mot « politique » dans mon titre vise la société organisée qui, au mitan du XIV e siècle, faisait référence à une gouvernance judicieuse. Il s’agit d’une définition claire de la position du psychanalyste dans la Cité, la πόλις grecque, la civitas latine. Il ne s’agit donc pas de l’État mais bien de la communauté des êtres libres qui vivent, non ensemble – ne soyons pas à ce point innocents –, mais dans le respect des lois françaises et de sa laïcité.

Une psychanalyste m’avait dit que je répète, celle-là même qui ne parle point et n’enseigne pas, ignore que transmettre c’est répéter jusqu’à ce que le discours révèle le désir. Je répète, comme le rameur qui rame : action répétitive qui amène à bon port. Seul l’imbécile pense qu’il est toujours sur la dune quand, à vrai dire, il se trouve dans le creux de la vague. Je répète donc parce que personne ne saisit un discours du premier coup. Il faut de la patience pour transmettre d’un côté et pour apprendre de l’autre. L’époque exige la mise en évidence du discours civilisé du côté de l’Autre barré, et les actes barbares du côté de l’Autre non barré et de la résistance du Surmoi, et de son cerbère, le Moi fort.

Le civilisé est du côté français en particulier, du côté occidental en général. De ce côté de la lecture du Réel, la loi symbolique et laïque impose aux organisations intramoïques de se calmer, de parler et non d’agir, sinon ils auront affaire à la police et à la justice.

Du côté barbare se trouvent les organisations intramoïques incarnées par des tyrans qui, au nom d’une politique d’exclusion de l’autre, s’autorisent à satisfaire leurs pulsions de destruction. Le colonel Kadhafi est un exemple d’hier, le colonel Poutine est son incarnation aujourd’hui. Du côté barbare se trouve aussi le Moi qui, au nom de l’idéologie religieuse, avec le bâton de la superstition inscrite dans le livre dit sacré, commet le sacrilège de tuer. Le christianisme d’hier, l’islamisme d’aujourd’hui.

Quid de la psychanalyse ? La psychanalyse accueille le Moi fort du tyran, ses organisations intramoïques et sa volonté de destruction dans le champ de combat de la consultation. Cette opération clinique dégonfle le registre imaginaire qui s’attache au Moi.

L’expérience du discours occidental est une belle expérience humaine. Elle n’est pas parfaite comme la voudraient les innocents, elle est favorablement humaine. Elle n’exclut pas l’autre parce qu’il est goy ou mécréant. Elle l’intègre. Au nom de la civilisation.

Cette civilité propre à l’Occident ne tolère plus que des barbares tuent des gens au nom des religions, que les enfants (garçons et filles) soient mutilés au nom de, soi-disant, traditions millénaires. Ces pratiques, je les interprète comme des vengeances des majeurs – car un adulte protège l’enfant – envers les nouveaux arrivant dans notre « bonne planète », dixit

Trenet.

La civilisation doit, au nom de la liberté symbolique d’être en Occident, contester des atteintes au corps et aux êtres. Quand un abruti, je fais référence au Moi gonflé, menace de tuer qui que ce soit qui toucherait au voile de sa sœur, en plein cœur de Paris, et qu’il repart libre du commissariat, le Symbolique perd de sa puissance de castration et renforce l’Imaginaire qu’il est permis de déchaîner les pulsions sans que cela coûte.

La lutte pour porter le Symbolique dans le discours social est une responsabilité majeure du psychanalyste, dans le cadre clinique.

L’Occident, l’Europe, la France vieillissent pendant que d’autres groupements humains se développent et veulent faire partie de la République mais sans payer le prix du tiquet d’entrée, à savoir le prix de devenir laïc, ou au moins être discret quant à ses superstitions ou croyances religieuses.

Les crises font partie de l’histoire des hommes. En revanche, il est nécessaire de constater que chaque crise apporte son lot de réveil, de découverte, d’invention, de construction quand elle est portée par des êtres. Quand ce n’est pas le cas, le Moi prend le dessus et parie sur la destruction puisqu’il ne voit pas plus loin que le bout de son nez. La parole, la discussion, la diplomatie, en d’autres mots, la présence de l’Autre barré, déjouent toute tentation de guerre, de larmes et de sang. La France, l’Europe, l’Occident maintiennent cet équilibre parce que, en choisissant le registre symbolique comme phare, le pays, le continent, l’aire culturelle évitent le pire.

La psychanalyse, le psychanalyste ont une responsabilité majeure dans la manutention du fil symbolique dans le discours social. Il est de leur devoir de contrer l’aliénation, le discours sociétal, imaginaire, idéologique. De là, l’importance de viser en France notre matière première : l’être parlant libéré des entraves de l’idéologie religieuse musulmane, de la politique russe, de la perspective sociétale des réseaux sossiaux, comme j’aime à les appeler pour indiquer leur niveau de culture, de connaissance, ainsi que leur pouvoir de nuisance.

Est-il possible de vivre ensemble ? Si cela n’est pas toujours possible dans un couple, si cela est suffoquant dans une famille, pourquoi exiger cela, sinon pour des raisons idéologiques, à des nations tout entières ? Respectons le droit de cité des uns et des autres. Venir en France et amener ses casseroles religieuses, traiter les Français de mécréants, de goys, cela fait désordre.

La santé mentale dépend de l’environnement dans lequel on vit.

Indépendamment de sa couleur de peau, de son lieu de naissance, il est possible de vivre dans un endroit, à condition de respecter ceux qui l’ont construit, bâti, élevé, érigé. C’est la grandiose compétence à assimiler propre à la France.

La psychanalyse produit une pensée nouvelle à partir de la castration. Cette production résulte d’un effet de vérité, c’est-à-dire d’une lecture la plus proche du vrai, du Réel.

Le discours religieux fait partie de ces inventions organisées par le Moi de l’homme pour se soulager et, une fois torché, se supporter d’être en vie sans exister.

L’évolution incontestée des sciences, donc d’une interprétation rationnelle du Réel, en Occident, est due au courage de refuser le dieu méchant du Moi abruti.

La pauvreté intellectuelle des sociétés ayant un régime religieux est le résultat de la présence de leur dieu partout dans la vie de tous les jours. C’était comme cela en Europe au Moyen Âge. C’est comme cela aujourd’hui avec l’entrisme ravissant de l’islamisme dans la vie sociale européenne, avec la complicité bienveillante des dirigeants populistes.

Le monde ne se décentre pas, il est structurellement décentré. Le discours psychanalytique apporte un discours de responsabilité de l’être envers son désir. Ce discours est porté par le désir de savoir. Il est donc opposé à toute forme d’idéologie et de prise de position reposant sur un dieu ou un représentant jouisseur et mauvais.

L’histoire se fait aujourd’hui avec le discours psychanalytique, celui de l’Autre barré, où l’être est responsable de sa vie, de l’enfant qu’il participe à mettre au monde et de la société dans laquelle il vit.

Les psychanalystes doivent se rassembler pour combattre l’aliénation, non pas avec des armes, mais avec des arguments logiques, issus de l’impossible existence sans la digne liberté, celle acquise par la construction d’une pensée parlée librement sur le divan et en société. En d’autres termes, le modèle de liberté français est incompatible avec le discours religieux : juif de France comme musulman de France, ce sont des arrangements signifiants inconciliables.

En France, il n’est possible que d’être français, c’est tout. Si le Moi a ce besoin viscéral de servir un maître, il le fera sans perturber son voisin. S’il le perturbe, lui et son dieu perturbateur se verront appelés à causer avec les règles de la civilisée, à savoir la justice et son bras armé, la police.

Comment vivre avec une médecine qui dorlote le malade au lieu de l’impliquer concrètement avec sa décision de guérir et de retourner au travail ? Avec des médecins besogneux d’amour qui donnent des arrêts-maladie pour fidéliser la clientèle ? Comment vivre avec un ministère de l’Éducation nationale quand l’éducation est le rôle des parents, de la vie scolaire et de la société toute entière ? Le ministère devrait se limiter à son rôle d’instruction nationale. Ces vandalismes, banditismes et incivilités de tout genre sont la preuve que des parents mettent bas des enfants sans se donner la responsabilité de les éduquer à devenir des hommes et femmes adultes et courageux. Cette jeunesse paumée d’aujourd’hui, la même qui porte le voile, quand des jeunes femmes meurent pour ne pas être obligées de le porter, est le résultat de la société toute entière et une faute des parents en particulier. Il se fait pressant le retour du désir sur la table de négociations de la vie sociale. D’abord en France, ensuite, que cette politique psychanalytique du désir bien dit, bien construit, soit exportée vers celles et ceux qui parient sur une existence possible.

Mon discours ne peut pas se faire sans qu’à la tête des gouvernements et des centres de décision se trouve l’être féminin, indépendamment du genre. Je ne cherche pas l’efficacité de l’être, mais son désengagement d’avec son Moi, aliéné. Quand il se sent frustré, il devient haineux, paresseux, tricheur. Une politique qui nourrit la logique communautariste est propre au discours immigré : une telle logique va comme un gant aux habitants des États-Unis car ce pays a été construit par des immigrés qui ont pris la possession d’une terre déjà habitée. Suis-je en train de les juger ? Pas du tout ! Je mets en évidence que ceux qui arrivent en France doivent, c’est la moindre des politesses, devenir Français. S’ils ne sont pas d’accord que les gens du pays mangent du porc, boivent du rouge ou montrent leurs cuisses, qu’ils retournent d’où ils sont venus, mais qu’ils n’emmerdent pas ceux qui sont contents d’être d’ici.

La visée des organisations intramoïques est la destruction, destruction aveugle, il faut le dire. Il n’existe pas de concurrence d’universalisme : pour les musulmans celui qui n’est pas de leur tribu est mécréant. La France, terre d’accueil, a cette tendance à accueillir ceux qui arrivent, à condition qu’ils se mélangent aux enfants du pays.

La France a une responsabilité : celle de contaminer l’Amérique du Nord, la Chine, la Russie, les pays musulmans, l’Amérique du Sud, de sa culture, de sa langue, de son art de vivre. Une telle politique pousse vers la construction, et non vers la destruction, les larmes et le sang.

Il s’agit d’une invitation, d’une proposition humaniste et non d’une intention de conquête. À part le Moi, aucun être ne souhaite vivre sous la coupe d’un autre, sauf, si telle est sa volonté, car il faut reconnaître que la victime aussi tire un bénéfice de sa maladie.

Aucun peuple ne dispose de lui-même. Le Moi dispose de la tutelle tyrannique de ses organisations intramoïques parce que cela le dégage de la responsabilité d’être castré.

Quand je nomme les réseaux sossiaux avec deux « s », manière d’évoquer la Schutzstaffel, j’indique la matérialisation de la tyrannie inculte de la populace ; mais quand ces mêmes réseaux se mobilisent pour détrôner un discours abject qui justifie que des femmes soient tuées parce qu’elles ne portent pas le voile maudit, je me réconcilie avec le peuple.

D’un côté se trouvent des interprétations symboliques du Réel sous forme de régime démocratique. De l’autre se trouvent les organisations intramoïques et le Moi fort pour, avec des interprétations imaginaires, ainsi imposer leurs lectures du monde, du Réel, à l’autre, leurs semblables. Les interprétations symboliques produisent des libertés ; les interprétations imaginaires, des autonomies sauvages, des logiques du chacun pour soi, des lois des plus forts, de la triche, de l’incivilité, de la violence. D’un côté l’illibéralisme, l’autoritarisme et l’autocratie ; de l’autre, la démocratie, la Loi, le service public au service de la population.

La France, les Français, se doivent de faire l’effort de porter les couleurs de leur manière d’être dans le monde. C’est en voyant le modèle français que d’autres personnes voudront cela pour elles aussi, pour leurs enfants. C’est une responsabilité éthique. C’est un projet.

La responsabilité des Français est de parler avec le monde. C’est dans son histoire. Cette parole doit être portée par le Symbolique et sur ce registre lacanien, le psychanalyste a une responsabilité et son mot à dire.